La bataille de l’estime de soi et tout ce qui “deviendrait possible si” est un marché de dupe. Bonne nouvelle : nous n'avons pas besoin de la mener... C.Deval. Voici pourquoi.


Christophe DEVAL

Une approche originale : une estime de soi basse ne vous empêche pas d’avancer dans la vie ! privilégiez plutôt la bienveillance (self-compassion), la pleine conscience et l'humanité partagée...C.Deval (2016). La bataille sans fin et inutile de l'estime de soi.

Qui est Christophe DEVAL ?
Directeur du développement des talents chez KPMG, psychologue thérapeute, spécialisé en thérapies comportementales et cognitives (TCC) et en thérapie d'acceptation et d'engagement (ACT)
  • VIDÉOS (à la fin de cet article) - Simplifiez vos relations avec les autres" : 4 vidéos du 12/01/2017 au 3/02/2017 (4 à 7 mn) 
  • LIVRE - Sortie le 19 octobre 2016 de "Simplifiez vos relations avec les autres" 
Un guide pratique pour simplifier vos relations, avec au programme, comment développer les 3 forces dont vous avez besoin pour avoir des relations épanouies:
- la flexibilité, pour agir malin au lieu de réagir à chaud de façon rigide
- l'empathie: pour mieux comprendre les autres
- l'équilibre: entre souci de soi et souci de l'autre
La deuxième partie du livre vous explique comment mobiliser ces 3 forces pour en finir avec les conflits et la peur des autres ainsi que comment aider les personnes en détresse. 

  • ARTICLE publié le 23 janvier 2017 - "Oubliez l’estime de soi : pensez bienveillance envers vous-même"


La bataille sans fin de l’estime de soi
Alors d’où vient ce problème d’estime de soi ? Tout d’abord, un cerveau humain a parmi ses activités favorites de porter des jugements. Sur tout ce qui se présente, donc pourquoi pas sur nous aussi. Ensuite, nous sommes programmés pour nous comparer aux autres. Et il y a toujours quelqu’un de plus jeune, plus beau, plus riche, plus intelligent etc que nous. Et, grâce à internet et aux réseaux sociaux, nous les avons en plus sous le nez facilement. Mais surtout, très souvent, c’est quelqu’un qui nous a mis ces jugements dans la tête : que ce soient nos parents, nos pairs à l’école, des professeurs ou encore des collègues.
Alors en quoi est-ce un marché de dupe ? Pour cela, un test simple. Prenez votre pire défaut, la chose que vous détestez chez vous. Et voyez depuis combien de temps cette idée est dans votre tête et depuis combien de temps vous essayez de vous en débarrasser. La plupart du temps, depuis des années voire des décennies. Ça ne vous parait pas douteux ? Vous ne pensez pas que s’il y avait une solution, vous l’auriez déjà trouvée ?  
La raison est simple : un cerveau marche par addition, pas par soustraction. Un cerveau apprend mais ne désapprend pas, donc quand une pensée rentre, c’est pour un moment. C’est pourquoi, même quand vous arrivez à vous persuader que vous vous dévalorisez à tort, il y a toujours une pensée du style « oui mais quand même » qui réapparait tôt ou tard. Pire, plus vous vous battez contre une pensée, plus vous lui donnez de l’importance et donc du pouvoir. Bref, c’est très difficile de gagner durablement une bataille contre soi-même.  

Les mauvais côtés de l’estime de soi

La bonne nouvelle est que c’est une bataille que nous n’avons même pas besoin de mener. Tout d’abord l’estime de soi n’a pas autant d’avantages que l’on croit. Par exemple, Baumeister et ses collègues ont entrepris de vérifier si l’estime de soi avait réellement un impact sur la performance professionnelle. Qu’ont-ils trouvé ? D’abord, que le lien entre une bonne estime de soi et la performance était très faible. Autrement dit, plus d’estime de soi ne vous apportera pas de bénéfices dans votre vie professionnelle. Si lien il y a, selon Baumeister, ce serait plutôt que la performance peut améliorer l’estime de soi (autrement dit, ce n’est pas en améliorant votre estime de soi que votre vie s’améliore, c’est l’inverse, et encore pas toujours). Par contre, Baumeister a trouvé un lien entre l’estime de soi et certains traits de personnalité. Il s’agit de l’égoïsme, du narcissisme et de l’incapacité à accepter la critique. Vous avez sans doute peut-être déjà rencontré de telles personnes, très confiantes en elles, qui ne doutent jamais, qui sont toujours très satisfaites d’elles-mêmes. Est-ce à ces personnes que nous rêvons de ressembler ?
Certains croient par ailleurs que se traiter durement a pour effet de se motiver à s’améliorer et que, sans cela, ce serait la porte ouverte au laisser-aller. Vraiment ? Rappelez-vous votre expérience avec vos professeurs à l’école. Est-ce que vous aviez davantage envie de progresser lorsque l’on vous encourageait, qu’on faisait preuve de bienveillance envers vous ou lorsque l’on vous disait que vous êtes nul(le) et que vous n’arriveriez jamais à rien ? Peut-être que ce n’est pas si différent aujourd’hui…

Une alternative : la bienveillance envers soi-même

C’est pourquoi il existe une autre approche qui présente les avantages de l’estime de soi sans en avoir les inconvénients : c’est la bienveillance envers soi-même (« self-compassion »), théorie développée par Kristin Neff (et aussi Paul Gilbert), et largement testée depuis. En quoi est-ce que cela consiste ? D’après la théorie de Neff, il y a 3 composantes :
 - la pleine conscience pour repérer ses jugements et les émotions qui vont avec (comme la honte), sans s’y identifier et penser qu’ils définissent qui nous sommes.
- la bienveillance, qui consiste à se traiter comme on le fait pour les personnes que l’on aime le plus. C’est-à-dire réagir à ses échecs et ses imperfections avec compréhension, en se rappelant que nous n’avons pas choisi la plupart de nos expériences, ni même la façon dont fonctionne un cerveau humain (qui juge tout le temps).
 - l’humanité partagée ou le fait de reconnaître que nous avons tous des jugements négatifs sur nous-mêmes, que cela fait partie de l’expérience humaine.
Au final, une bonne estime de soi ne garantit pas une amélioration dans votre vie. A l’inverse, une estime de soi basse ne vous empêche pas d’avancer dans votre vie. Les jugements négatifs sur soi ne sont que des étiquettes, donc des pensées. Et les pensées ne mordent pas et elles ne nous empêchent pas de bouger les bras et les jambes, c’est-à-dire d’avancer dans notre vie. Sauf si nous leur laissons ce pouvoir…"
Vidéos Conférences " Simplifiez vos relations avec les autres" du 12/01/2017 au 3/02/2017 (4 à 7 mn) :